Chapitre 1 - Mont Valérien
- Leighton Lavi
- 30 avr.
- 9 min de lecture
16 Aout 2024
19h25
Suresnes
C'est ce soir.
On se l'ai dit, on se l'ai répété.
C'est ce soir, le dernier soir.
On y a cru... et on aurait aimé y croire encore. J'aurais aimé y croire encore.
Mais non. C'est ce soir. Ça s'arrête ce soir.
Il m'a dit qu'il passait me chercher à 19 h 30, alors j'enfile la robe qu'il a adoré lors d'un de nos premiers rendez-vous. Assise sur le lit, je glisse mes pieds dans mes escarpins. Je m'observe dans le miroir face à moi, et je ne peux pas croire que je me prépare pour... nos adieux. J'ai décidé de me maquiller comme peu de fois je l'ai fait avec lui. Je veux me protéger de toute larme. M'en faire une armure pour cette soirée. Je veux qu'il se souvienne de moi, de toutes mes facettes.
Je me lève, traverse la pièce jusqu'à la salle de bain. Je termine les dernières boucles dans mes cheveux quand mon téléphone vibre.
Je suis en bas miss
Je le déteste.
Pour tout ça.
Pour avoir été aussi parfait avec moi pendant tout ce temps.
Et, de continuer à l'être, même ce soir.
J'arrive
J'attrape le parfum. Celui que j'ai acheté pour notre premier date.
Celui qui est devenu le nôtre. Je m'en imprègne, pour la dernière fois.
Puis, sans réfléchir, je le jette dans la corbeille.
À quoi bon.
J'enfile ma veste, attrape mon sac à main et claque la porte.
En arrivant en bas, il m'attend hors de sa voiture.
Je prends une grande inspiration.
Le revoir, réveille mes papillons.
Je sens mes joues rougir sous mon fond de teint.
Les claquements de mes escarpins résonnent comme un compte à rebours qui me rapproche de lui.
Son regard, se pose sur moi.
Je fonds, mais mon cœur se brise à mesure que je m'approche.
À sa hauteur, il attrape ma hanche pour me ramener délicatement vers lui en posant ses lèvres sur ma joue.
Son contact me fait vibrer.
La délicatesse de cet homme est sans nom, je ne m'y suis jamais faite.
— Bonsoir miss, tu es magnifique, me dit-il d'un ton teinté de rancœur.
— Bonsoir vous... Je te remercie, en lui souriant.
Je le regarde droit dans les yeux, il en fait de même.
Je ne peux pas m'empêcher de me rapprocher un peu plus.
J'ai longtemps mis des distances physiques entre nous.
Ce soir, je ne veux avoir aucun regret.
Je veux vivre cette soirée comme si c'était la dernière...
Je pose ma main sur sa mâchoire, mon pouce caresse sa joue.
Je veux m'imprégner de chaque centimètre de sa peau pour ne jamais les oublier.
Les ressentir jusqu'à la fin de mes jours.
Il ne dit rien, et patiente pour voir ce que je m'apprête à faire.
Pendant quelques secondes, le temps s'arrête.
Et mes lèvres se posent contre les siennes.
J'ai l'impression de reprendre mon souffle.
Sa main restée posée sur ma hanche se contracte.
Ses doigts se serrent contre ma peau.
Ma main sur sa mâchoire le maintien plus fermement.
Nos lèvres échangent un long moment ensemble.
C'est le dernier premier baiser de notre soirée.
— On y va ? Dit-il le regard planté dans le mien.
Aucun mot ne sort de mes lèvres, comme si je voulais garder encore un peu des siennes.
Je passe devant lui, direction sa voiture.
Une fois dans l'habitacle, son odeur m'enveloppe.
Ça sent la virilité, la sécurité.
Ce parfum que je ne connaissais pas avant lui
Que je n'associe qu'à lui...
J'ai besoin que tout m'appartienne encore un peu : chaque odeur, chaque couleur, chaque gout, ne dépendent que de lui et de son souvenir.
Comme à son habitude, une fois qu'il a démarré, sa main se pose sur ma cuisse.
Il fait encore jour mais le soleil est sur le point de ce coucher.
Quelques minutes plus tard, nous arrivons en haut du Mont Valérien.
On sort de la voiture et on se dirige vers les bancs face à Paris.
La coïncidente est improbable.
Que tout soit si beau et parfait alors qu'on se quitte.
On s'assoit sur le banc, et il se tourne vers moi.
— Tu sais que la vue est de ce côté, non ? je lui lance.
— La vue ? Non. La vraie vue est devant moi.
Je bloque sur lui quelques secondes puis porte mon regard sur le Paris.
— Tu es gênée n'est-ce pas ?
Je ne quitte pas mon regard de la vue.
Il me connait par cœur. Je lui ai tout dit, tout raconté.
Il lit en moi d'une facilité qui me perturbe depuis le premier jour.
— Bien sûr que je le suis, Isaac.. Depuis toujours, c'est..
— C'est moi ? En me coupant, en souriant bêtement. Je te perturbe depuis le premier jour..
Je tourne la tête vers lui.
Il a ce sourire qui me fait fondre depuis la première fois.
J'en suis tombée éperdument amoureuse d'ailleurs.
Il est bête, oui. Et j'adore ça.
Mais d'un coup, je me rappelle que je suis ici pour la dernière fois.
Que je dois faire le deuil de ce sourire, de cette personne.
Je lui suis tellement reconnaissante d'avoir été lui, d'avoir fait mon bonheur pendant ce chapitre de ma vie.
Je lui souris et tourne de nouveau les yeux.
Le soleil est sur le point de disparaitre à l'horizon.
Tout est clair et sans ombre sur le tableau.
L'orange et le rose se mélangent au bleu parfait du ciel.
Paris s'illumine doucement. L'ambiance devient feutrée.
Je n'ose pas le toucher de nouveau, j'ai peur de réaliser que tout ça n'existe pas, que tout ça disparaisse.
Et c'est à ce moment-là, qu'il glisse sa main sur ma hanche me ramenant un peu plus vers lui.
— Laisse-moi être prêt de toi ce soir, Éléa...
Ces doigts se mettent alors à me caresser délicatement les hanches.
Je sens les frissons parcourir mon corps.
Je me tends. Pas de gêne ou de malaise. Juste l'envie. Le besoin de sentir sa peau contre la mienne.
J'adore sentir qu'il ne peut plus s'empêcher de poser ses mains sur moi.
Je sais qu'il adore ça, et que s'en empêcher est impossible pour lui.
Ces gestes ont toujours été d'une douceur absolue envers moi, remplis de bienveillance et de sincérité.
Je n'ai jamais douté de ses intentions.
J'ai cru à chacun de ses gestes, chacune de ses caresses, à tous ses baisers sans exception.
Il m'a toujours fait sentir comme celle qui compte. Comme la plus importante à ses yeux.
Son regard sur moi est resté identique tout au long de cette histoire.
Même encore ce soir, je ne doute pas de ses intentions de me rendre heureuse et de prendre soin de moi.
C'est le moment qu'il choisit pour embrasser mon épaule.
— J'aurais voulu t'embrasser toute ma vie Isaac... dis-je la voix complètement tremblante.
— Je sais, Éléa... Je sais. murmure-t-il, ses lèvres encore posées sur moi.
— Ça va être si dur.
Il ne répond pas. Il me serre un peu plus fort dans ses bras.
Je sens sa respiration dans mon cou, son souffle dans mon oreille.
3 Avril 2024
20h03
Le Plessy-Robinson
Ça me ramène à ces moments si beaux et intenses avec lui.
À nos peaux qui s'entremêlent.
À cette envie de l'autre qui ne nous quitte plus.
Son regard si tendre sur mon corps.
Jamais un homme ne m'avait fait ressentir ça.
Je ne m'étais jamais sentie aussi bien près d'un homme.
Aussi en confiance. Aussi sûre de moi.
De mon corps. De ma beauté.
Avec lui, je me suis sentie vivante.
J'aimerais garder toute la vie en mémoire son regard, et tous ses mots qu'il a pu prononcer pour moi, pour me rendre encore plus belle.
Je crois que c'était à notre quatrième rendez-vous.
Je commençais à avoir peur, peur de perdre cette connexion si douce.
Il m'avait invitée chez lui. Et pour la première fois, il avait mis les petits plats dans les grands.
Son appartement était parfaitement rangé, rien ne trainait.
Deux verres déjà posés sur la table basse, une bouteille de vin rouge, un petit pot de pistaches.
La télé allumée, mais pas sur une chaîne d'info : une playlist douce, choisie pour l'occasion.
Je pose mon sac à coté de la table basse, comme à mon habitude.
Je l'observais, un peu troublée.
— Je crois que tu as besoin de ça, non ?
J'en ai eu le souffle coupé.
Comment avait-il su... ?
Comment avait-il fait l'effort de faire ça pour moi ?
Me voyant sans mots, il a continué en m'invitant à m'assoir à coté de lui.
— Éléa, je sais que rien n'est facile pour toi. Tu me le dis, mais je le ressens aussi. Tu me le fais ressentir.
— Et même si je ne comprends pas tout, j'ai envie de t'apaiser. D'être là. De t'offrir un moment de répit dans ta vie.
Je me suis ensuite mise à sourire, bêtement.
Je ne voulais pas croire à tout ça. Il se jouait de moi, il ne serait pas le premier de toute façon.
— Si je peux être une parenthèse pour toi... alors je le serais.
Voyant que je ne réagissais pas, il se comptanta de mon sourire, et nous servit nos deux verres.
— À cette soirée la miss
— Merci, Monsieur...
On a parlé longtemps.
De tout, de rien.
Comme à notre habitude.
Puis ce désir a surgi, encore. Irrésistible. Mais différent, cette fois.
Bizarrement, cette fois, nous ne sommes pas restés là. Il s'est levé et m'a tendu la main.
— Tu me fais confiance ?
Je l'ai regardé avec beaucoup d'hésitation, mais évidement que je lui faisais confiance.
Et ça depuis le premier jour.
J'ai alors glissé ma main dans la sienne.
Il m'a conduite dans sa chambre.
Cette pièce encore inconnue, malgré notre intimité déjà partagée.
Il n'avait pas allumé la lumière principale.
Juste une petite lampe tamisée sur une commode.
Il a refermé la porte derrière nous.
L'ambiance est devenue douce, chaleureuse.
Je ne comprenais pas tout ce qu'il se passait. Mais j'avais envie de croire en lui.
De lui donner toutes les cartes.
Je voulais croire en cet humain.
De lui faire confiance aveuglément.
J'ai tellement douté et eu peur dans ma vie, que je souhaitais essayer, au moins une fois.
Alors je me suis installée sur le lit, j'ai enlevé mes chaussures, ma veste.
Il m'a rejoint. On s'est allongés, face à face.
Bien qu'on ait déjà partagé nos corps, ici...
C'était différent.
L'odeur de ses draps, de sa chambre, me donnait l'impression d'être vraiment proche de lui.
Il glissa une main sur ma joue, le caressant de son pouce.
— Tu es si belle... me dit-il doucement.
Je n'ai pu m'empêcher de ricaner.
— Pourquoi tu ne veux pas me croire ?
— Parce que je n'ai jamais eu l'occasion de croire les mots d'un homme, Isaac...
— Je ne peux pas te croire, on n'est pas tous comme ça.
— J'espère que non... Mais tout ce que j'ai connu m'a fait croire que je ne valais rien. Que je n'étais pas digne d'être aimée.
— Tu en vaux la peine, Éléa. C'est fou que tu ne le voies pas.
— Il faut que tu changes cette idée. Tu es si belle. Si drôle. Tu as un charme fou...
Je n'avais pas les mots.
J'essayais simplement de m'imprégner des siens.
Sa main se posa alors sur mes hanches, ou il glissa quelques caresses avant de la passer sous mon haut.
Ses doigts sur ma peau me firent frémir.
Mon regard plongé dans le sien, je commençais à me mordre la lèvre.
J'aimais son contact, j'adorais ses mains et ses doigts sur moi.
Comme s'il me rendait mes droits, ma confiance en moi.
Comme si son contact faisait de moi enfin celle que j'étais vraiment.
Sa main montant le long de mon flan, et je le désirais un peu plus encore à chaque centimètre parcourus.
Je finis par poser ma main sur lui.
Et il prît ça pour un top départ.
D'un geste délicat, il se retrouvait au dessus de moi.
Je me sentais fragile, petite et j'adorais ça.
Ses lèvres se posèrent enfin sur les miennes.
Tendrement. Différentes.
J'avais l'impression qu'il avait trouver le timing parfait pour cette soirée.
C'est ce dont j'avais besoin et envie, et j'avais espoir qu'il me montre cette facette de lui.
Dans cette chambre, dans ce lit, je me trouvais parfaitement à ma place.
Une fois notre baiser terminé, il passa ses lèvres sur mes joues, mon front, ma mâchoire et mon cou.
Il s'y attarda longtemps, très longtemps.
Chaque millimètre de ma peau reçoit sa tendresse.
Pendant ce temps, ses mains exploraient mon corps, lentement, doucement.
Il flâna sur ma poitrine, fit monter le désir.
Puis, ses lèvres rejoignirent ses mains.
Mon premier gémissement ne pu s'empêcher de sortir, et je le sentais sourire, fier de ses gestes.
Il souleva mon haut, embrassa ma poitrine, mon ventre.
Je n'ai jamais aimé cette partie de mon corps.
Mais lui, il l'aimait. Il me le montrait.
Il la touchait, l'embrassait, la mordait doucement.
Il fit glisser ma jupe, mon string, mes chaussettes.
Et il savourait.
Moi aussi.
Mes mains s'agrippaient aux draps.
Je le voulais.
C'etait différent. C'etait lui.
Au bout de quelques minutes, il remonta vers moi, m'embrassa avec une telle passion que je restais figée sur place.
Il attrapa un préservatif sur sa table de nuit.
Je l'observais, le dévorais du regard.
Il s'allonga de nouveau sur moi.
Il m'embrassa avec une passion que je ne lui connaissais toujours pas.
Une main sur ma joue, pendant que l'autre le guida en moi.
Ses premiers mouvements me font déjà chavirer.
Il passa sa main dans ma nuque, me tennait un peu plus fort.
M'embrassa en même temps.
Son souffle s'accélérait. J'aimais ça.
Mes mains se baladaient sur ses hanches. Ses flans. Son dos.
Mes ongles si accrochaient.
Son souffle qui glissait dans mon cou. Dans mon oreille.
Je perdis pied.
J'aurais voulu que ce moment dure toujours.
Cette tendresse, cette intensité.
Parce qu'avec lui...
Tout avait toujours eu un goût particulier.
*
La nuit est tombée.
Ma tête est posée sur son épaule.
Sa main joue doucement avec la mienne, ses doigts glissant sur mes phalanges comme un adieu muet.
J'aimerai tellement que le temps s'arrête.
Que je puisse encore profiter de lui.
De sa peau.
De sa sécurité.
De ses bras tatoués.
De son odeur que j'espérerais ne jamais oublier.
Il m'embrasse le front, m'enlevant de mes rêveries.
— On y va Mademoiselle, on va finir par être en retard.
Je me redresse.
Je me lève.
Et laisse le banc derrière moi.
C'était notre premier... et dernier moment ici.
Un endroit suspendu.
Hors du temps.
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